Dernière mise à jour : 24 août 2023

Éoliennes en Crète : les habitants prêts à tout pour sauver leurs terres

« Si le vent s’arrête, que se passe-t-il ? On se reporte sur les centrales conventionnelles. Mais elles ne peuvent pas démarrer d’un seul coup. Donc elles ne s’arrêtent jamais. »

Reportage audio de France Info, disponible sur notre chaîne YouTube (photo : ARIS MESSINIS / AFP)
France Info 29 décembre 2016 Crète

Crète : la face sombre du nouveau paradis des éoliennes

Expropriations, intimidations policières, efficacité contestée : la politique du gouvernement grec, consistant à faire de la Crète un gigantesque parc éolien, suscite l’opposition des habitants, prêts à tout pour conserver leurs terres.

Reportage d’Angélique Kourounis
France Info - Radio France - 29/12/2016

Des éoliennes fleurissent sur les collines crétoises. En récession depuis sept ans, la Grèce subit une cure d’austérité drastique et survit sous perfusion financière de ses créanciers, qui exigent des réformes. L’une d’entre elles est l’ouverture du marché énergétique, qui inclut l’installation massive d’éoliennes. Il est même question de faire de l’île de Crète un hub énergétique entre le Moyen-Orient et l’Europe.

Les Crétois s’y opposent, accusant le gouvernement de les spolier et de détruire leurs terres. Sur la place du village de Palea Roumata, dans le sud-ouest de l’île, un seul sujet domine les discussions : celui de l’expropriation en cours des paysans. Yanis, retraité, accuse même le gouvernement de malversations. « Ils ont affiché les expropriations à la mairie d’Akrotiri, à 80 kilomètres d’ici. On n’a rien vu venir », dit-il.

Des experts remettent en cause l’intérêt des éoliennes

Costas, un agriculteur d’une quarantaine d’années, cultive son champ près du village. À la tête de la contestation, il paie cher sa participation à toutes les batailles : « Pendant deux ans, la région a été quadrillée par la police. Les forces anti-émeutes étaient tous les jours dans la rue. Il régnait un terrible terrorisme d’État. À chaque manifestation, on m’a emmené. On m’a traduit dix fois en justice. »

De son côté, le gouvernement défend son projet au nom de l’énergie verte. Mais cette théorie est remise en cause par Flora Papadede, une ingénieure de la DEI, le fournisseur historique d’électricité dans le pays : « Pour que le réseau électrique fonctionne parfaitement, il faut que la demande corresponde exactement à la demande à tout instant. Sinon, c’est le black-out. »

« Si le vent s’arrête, que se passe-t-il ? On se reporte sur les centrales conventionnelles. Mais elles ne peuvent pas démarrer d’un seul coup. Donc elles ne s’arrêtent jamais. »
— Flora Papadede, ingénieure

À Athènes, Michalis Verriopoulos, secrétaire général au ministère de l’Énergie, rejette ces arguments et affirme tout ignorer des expropriations en cours : « Où est le mal avec cette technologie ? Elle est rôdée, pas chère. Et si on l’utilise précautionneusement, elle est très bénéfique ! »

Hors micro, les Crétois confient être prêts à tout pour sauver leurs terres. Il y a quelques mois, ils ont réussi à renvoyer sur le continent des éoliennes débarquées dans le port d’Héraklion.